
Parfois
Parfois, rien n’est plus libertin qu’un baiser…

Miracle de Noël
– 18:30, le 24 décembre 2020
Il est presque l’heure d’aller se coucher quand, comme Elsa, on passe le réveillon de Noël seule en période de Covid.
Quarante ans, propriétaire d’un appartement digne d’un magazine de déco, un job « passion » que lui envient tous ceux qui ne savent pas combien elle s’y ennuie… On ne lui connaît pas de partenaire régulier, mais elle choisit garçon ou fille au gré de ses envies. Une vraie vie de rêve. Pourtant, ce soir, comme chaque soir, Elsa se glisse nue sous une couette froide, ferme les yeux et s’endort.

— Je ne comprends pas, Monsieur…
— Elsa est votre cliente Valentino ! Cela représente son rêve érotique le plus ancien. Votre mission est de le faire se réaliser.
L’ange gardien débutant Valentino est très embêté. Avec une moue vaguement dégoûtée, il pose une photo devant lui. On y voit une femme nue à quatre pattes, nue devant un sapin décoré. En arrière plan, on devine une autre femme, également nue qui attend.
— Mais ce n’est pas un souhait de Noël !, éructe Valentino désemparé.
— Bien sûr que si. Cette épreuve constitue votre unique chance de passer à l’échelon supérieur. Soyez créatif jeune homme !
Réaliser un vœu le soir du Réveillon devrait être un jeu d’angelot. Sauf lorsqu’on vous assigne une femme qui a pour seul désir de retrouver une ex.
Valentino n’a pas le choix : Il doit réaliser ce souhait s’il veut passer au niveau supérieur.
Surmontant son aversion première, il scrute à nouveau la photo : il reconnaît sans peine la jeune femme a quatre pattes. En traînant des ailes, l’ange se rend au fichier central pour en savoir plus sur l’autre femme. Il n’a aucun problème à identifier Marion, l’amour de jeunesse d’Elsa. En feuilletant le dossier, il découvre une histoire compliquée. Elsa était la soumise de Marion. Une position pas si enviable que cela s’il en croit ce qu’il a sous les yeux : d’autres photos, sur lesquels sa cliente est le plus souvent nue et à genoux, montrent les deux amantes dans des occupations sans équivoque: jeux sexuels particuliers, corps à corps torrides, mais aussi déguisements humiliants… Une vie de débauche selon Valentino. Il ne fut pas étonné de lire le compte rendu concernant une rupture douloureuse dont Elsa ne s’est remise qu’en se plongeant dans le travail.
L’ange n’y comprend rien : comment Elsa peut elle avoir envie de revivre de telles expériences ? Sa cliente souhaite pourtant ardemment revoir Marion, sinon elle n’en rêverait plus vingt ans après !
Valentino décide de faire l’impasse sur la dimension sexuelle de la photo. Il va les réunir. Espérons que cela sera suffisant pour valider son échelon.
Les talons d’Elsa claquent et résonnent dans le hall en marbre. Elle devrait être en rendez-vous depuis déjà cinq minutes.
— Retenez la porte !, crie-t- elle avant de se propulser dans l’ascenseur, pile au moment où les mâchoires d’acier se referment derrière elle.
Alors qu’elle reprend son souffle, la lumière des néons de la cabine vacillent. Elle relève la tête : la lumière s’éteint. Elsa laisse échapper un petit cri, auquel répond une voix de femme:
— Tu n’as jamais su te tenir.
Ce timbre, cette intonation… Plongée dans le noir, Elsa croit d’abord avoir entendu un fantôme. Prenant son courage à deux mains, elle demande :
— Marion ?
La lumière se rallume : Elsa, que la surprise a poussé à s’assoir, dévore l’apparition des yeux. A peu de choses près, les deux femmes sont vêtues de la même façon : tailleur strict et talons hauts.
Elle note les sublimes escarpins, la couture des bas qui s’échappe de la chaussure et remonte le long de là jambes fines.
Elle voudrait poser 1000 questions. Une seule lui monte aux lèvres :
— Ce sont des bas ?
— Pardon ?
— Ben oui : Je suis dans mon rêve. Je fais ce que je veux. J’ai le droit d’être directe. D’ailleurs, si j’en ai envie, je peux passer la main entre tes cuisses. Rien ne me l’interdît.
Elle joint le geste à la parole sans attendre.
— Pas de culotte ! J’en étais sûre !
Très vite, ses doigts s’agitent et s’enfoncent dans l’intimité moite…
Le son strident d’une alarme envahit l’espace. La sentence retentit:
« Violation du règlement. Échec de la procédure. Il vous reste deux essais. » Tremblant, Valentino se cache derrière ses ailes.
— Trop rapide, jeune homme, et bien trop brutale comme approche ! Vous devez y mettre plus de formes. Et le consentement ? N’avez-vous rien appris en formation.
L’ange se prend la tête dans les ailes : quel idiot ! Les humains et leurs satanées coutumes ! Il n’avait jamais réussi à s’y habituer. Au XXI siècle, une femme peut être à la fois « libérée » et prude, libertine et rangée… Pour vivre au sein d’une société dite « civilisée », les humains se sont enfermés dans des injonctions contradictoires. Les femmes surtout. A croire qu’elles font peur ! Mais l’ange a retenu la leçon durement apprise : on ne touche pas une femme sans son consentement. S’il ne respecte pas les règles, toutes ses initiatives tourneront court et il ne pourra pas remplir sa mission.

Dans son grand appartement, Elsa ouvre les yeux et cherche son réveil. Seulement 23:00 ? Elle se tourne sur le côté et se rendort.
Depuis qu’Elsa a installé cette appli de rencontres il y a quelques mois, elle n’attend qu’une seule notification : « le compte Nouveaux Horizons vous a envoyé un message ». Elle ne sait pas qui se cache derrière ce profil. Ils correspondent depuis quelques semaines : d’amicaux, les messages sont devenus sexy, puis torrides. Au point qu’il suffit à présent à Elsa d’entendre le « bip » caractéristique de l’application, pour mouiller sa culotte.
Ce soir-là, Elsa n’a même pas pris le temps de se mettre à l’aise en rentrant du bureau : Nouveaux horizons lui a proposé un jeu un peu plus épicé que d’habitude. Ses phrases sont plus courtes, plus sèches, bien plus directives aussi. Depuis que son correspondant a commencé à lui écrire ainsi, Elsa est chamboulée : moins attentive, fébrile, mais aussi bouillante de désir. Elle redécouvre avec délice le plaisir d’obéir.
Son portable bipe :
« Possèdes tu des jouets petite pute ? »
Ses mains glissent toutes seules sur l’écran :
« Oui. J’ai un gode. »
« Gros ? Envoie-moi une photo. »
Le sextoy est rangé dans le tiroir de la table de nuit. Elsa s’en saisit et, le plus naturellement du monde, le prend en photo pour l’envoyer à un inconnu. La réponse arrive presque immédiatement :
« Hum… J’aimerais te voir l’utiliser. »
Elsa avait anticipé cette demande. Assise sur le bord de son lit, elle avait déjà commencé à jouer avec le gode.
Elle manque de le lâcher quand elle lit la dernière phrase de son correspondant :
« Tu feras ça une prochaine fois. Ce soir, je te propose de nous rencontrer IRL. »
Valentino est très fier d’avoir retenu cet acronyme humain barbare qui signifie « In Real Life » : Dans la Vraie Vie. Ça lui fera sans doute des points en plus.
Choisir sa tenue, se préparer, retrouver le plaisir de se sentir belle pour une autre personne… Avec le couvre-feu et les mesures sanitaires, Elsa a presque oublié ce que ça fait de sortir le soir. Il lui semble qu’elle y prend encore plus de plaisir qu’avant. Quand elle claque la porte derrière elle, Elsa a l’impression de partir à l’aventure.
« Il faut savoir prendre des risques ! » se répète Elsa en boucle depuis qu’elle a compris qu’elle se rendait directement chez son inconnu. Comment faire autrement en période de Covid ? Alors qu’elle traverse Paris en métro, son imagination s’envole. Elle se voit déjà prise par des mains puissantes et viriles sans qu’un seul mot ne soit échangé. Cette escapade décalée lui fait un bien fou : elle court presque à la rencontre de… qui au fait ? Elle ne sait rien de lui. Ou d’elle ? Ce serait étonnant, mais pas impossible… Au fil des stations, elle remonte leurs multiples conversations, qui ne recèlent aucune information personnelle. Elle avait elle-même fixé cette règle. Une pointe de crainte se mêle à son excitation. Bien loin de la faire reculer, elle ne fait qu’attiser son désir. Son ventre bouillonne. Durant les derniers mètres qu’elle parcourt à l’air libre, des dizaines d’images se bousculent dans sa tête : homme, femme, amant romantique ou maîtresse fougueuse, chaque possibilité la fait vibrer.
Elsa compose le code de déverrouillage d’une porte cochère, puis la suite de chiffre qui appelle l’ascenseur. Direction le septième étage. Première porte à gauche. Elle frappe. La porte s’ouvre.
Une femme lui fait face. Elle est belle, vêtue de lingerie en dentelle et de tulle, une coupe de champagne à la main.
— Joyeux No… Toi ?
— Marion ?, s’exclame Elsa, prise d’un irrépressible tremblement.
« Quel cauchemar ! », murmure Elsa avant de se lever pour aller boire un verre d’eau.
« Échec de la procédure. Il vous reste un essai. »
Valentino ne comprend pas : il a pourtant travaillé son scénario, pris le temps d’approfondir les désirs de sa cliente en s’assurant qu’elle était sur de ses choix. Pourquoi ce deuxième échec ?
— C’était mieux, jeune homme !
Cependant, votre cible garde son libre arbitre.
— Mais j’ai réalisé son souhait puisque je les ai réunies !
— Son vœu est de revoir son amie et que cela se passe bien. Elle a décidé que ce genre de retrouvailles ne lui convenait pas.
Valentino en aurait coupé ses ailes de dépit. Pour qui se prenaient ces humains à contrarier les plans qu’on écrivait pour eux ?
— Dernier essai, jeune homme ! Peut-être devriez-vous faire simple…
L’ange ne sait plus où il en est : être créatif, mais simple… Il n’est pas humain après tout !
Fataliste, l’ange reprend l’ensemble de ses notes. Où qu’il regarde, il n’est question que de « hasard », « destin », « fortune »… Autant de noms donnés aux actions accomplies chaque jour par ses semblables. Rien n’indique qu’un ange ne peut pas s’en remettre lui aussi à la chance…
Pelotonnée sous sa couette, Elsa se laisse aller vers le sommeil avec une pointe de nervosité. Son dernier rêve l’a secouée. Elle pense beaucoup à Marion ces temps-ci…
Elsa déteste faire ses courses. Le rayon fruits et légumes de Grand Frais un samedi matin reste, à ses yeux, le pire endroit au monde. C’est pourquoi quand elle s’y rend, Elsa s’enferme toujours dans sa bulle : son casque vissé sur les oreilles, la musique résolument trop forte, elle prend garde à n’accrocher le regard de personne. Perdue dans ses pensées, Elsa met donc un moment avant de comprendre ce qui se passe autour d’elle.
Deux hommes parlent trop fort du côté des fruits exotiques.
— Allez, Mademoiselle ! Donne ton 06, c’est Noël, mon pote a le droit à un cadeau !
— T’es charmante, alors sois gentille ! Pour me faire plaisir !
Les caddies contournent le groupe sans s’arrêter. Heureusement qu’il n’y a pas grand monde dans le magasin, sinon la femme masquée par la carrure des deux agresseurs se ferait sans doute chicaner parce qu’elle gène.
Armée de son plus beau sourire, les épaules en avant, Elsa bouscule l’un des deux hommes.
— Tu es là ! Ça fait dix minutes que je te cherche !
— Elsa ?
— Marion ?
— Hey ! Regarde elles sont deux !
— Très mignonnes en plus !
En s’érigeant en héroïne du rayon frais, Elsa n’a pensé à rien. Pas au fait qu’une fille qui en aide une autre peut exciter ceux dont le cerveau a migré entre les jambes. Ni, surtout, au fait qu’elle pourrait retomber sur son ex à cette occasion. Ainsi se retrouve-t-elle sans voix, frappée de plein fouet par son passé.
— Viens, on s’en va !, dit Marion en lui attrapant la main pour la tirer vers la sortie.
Elsa repose une barquette de fraises de toute façon hors saison. Les deux femmes quittent la grande surface sous les sifflets moqueurs. Une fois sur le parking, Marion lâche la main d’Elsa.
— Merci…, lancent-elles ensemble.
Il y a de quoi sourire malgré la gêne.
— Dommage que les cafés soient fermés. Je t’en aurais offert un pour te remercier.
— Oui… Saleté de Covid… Tu habites loin ?
— Non !
Dans son sommeil, Elsa sourit.
Valentino aussi. Pourtant, la notification de sa victoire se fait attendre. Il avise son supérieur et l’interpelle :
— Monsieur ? Pourquoi ne se passe-t-il rien ?
— Soyez patient, jeune homme !, dit-il en s’éloignant. La magie n’a pas encore opérée.
L’ange s’assoit, dépité.
Matin du 25 décembre
Elsa se réveille tard. Les yeux clos, elle tend son bras. Évidemment, la place à côté d’elle est vide. Pourtant, ce matin-là, une sensation de tristesse l’étreint. Elle ouvre les paupières et englobe sa chambre du regard.
Elle se redresse brusquement. Rien ne semble différent pourtant… Il flotte dans l’air une odeur… de pain grillé.
— Salut, ma belle. Une tartine ou deux ?
« Mission accomplie. Vous passez au grade supérieur. Bravo. »

Pour vos cadeaux de dernière minute…
Nous sommes le 24 décembre et il vous manque LE cadeau ? Vous n’avez pas trouvé ce qui fera vibrer l’élu(e) de votre cœur après les petits fours, les huîtres, la dinde et la bûche ?
Passez donc chez Metamorph’Ose !
On ne présente plus la boutique (Mais au cas où, retrouvez l’article de Chaki ici)
Martine et JP vous accueillent pour trouver avec vous le cadeau qui rendra ce Réveillon inoubliable.
Joyeux Noël à tous !

Plaisirs solitaires
J’aime le contraste de ma main fraîche, qui part sous ma lingerie…

Une activité récréative
Une jeune femme découvre l’onanisme.

Stilettos
Quand une histoire de talons très hauts vous entraine très loin dans le rêve et l’érotisme.

Le retour de Miss Kat
Voila un moment que je n’ai pas posé ma plume ici. Il y a une raison à cela : j’ai été cyber harcelée pendant plus de deux ans.

L’aviateur
Ce soir, je voudrais partager une pensée particulière avec vous.

Eva naissance
Un nouveau texte court, inspiré par un dessin de Niko (son insta: niko_blanche_8) Bonne lecture !

Des fleurs sur sa peau
Bon anniversaire Niko ! Voici un petit texte pour aller avec ce superbe dessin de sa muse. J’espère qu’il lui plaira et qui’l vous plaira.