J’ai longuement hésité à publier cet article. J’ai déjà dit à plusieurs reprises sur ce blog que je n’étais absolument pas pour la pénalisation des clients de prostituées, encore moins pour l’abolition de celle-ci.
Cet article est avis, un ressenti. J’aimerai vraiment connaitre les vôtres.
Le BDSM une pratique chic et respectable ?
En tant qu’auteur érotique, j’ai écrit plusieurs nouvelles mettant en scène des rapports de soumission et de domination. Autant le dire, le sujet me passionne depuis déjà de nombreuses années. J’ai lu les classiques du genre : Histoire, d’O., Sade… Depuis la déferlante “50 nuances de Grey” j’ai vu ce genre de relations fleurir un peu partout dans les livres, jusque dans les romances un peu chaudes. Grâce au “Mommy porn”, le SM (ou BDSM soit Bondage, Domination, Soumission, Masochisme) est sorti du bois. Il est devenu acceptable, voir émoustillant d’admettre qu’on aime recevoir des fessées parce qu’on n’a pas été sage. Pas trop grosse quand même, les fessées. Il ne faudrait pas que cela fasse (trop) mal.
C’est oublié que le BDSM regroupe nombre de pratiques extrêmes que Christian Grey lui-même n’a sans doute jamais expérimentées. Mais libre à n’importe qui de se prendre pour la douce Anastasia si cela lui chante.
Par contre, quand j’ai lu dans cet article qu’on trouve à présent des “soumises professionnelles”, j’avoue que j’ai eu peur.
Petite précision : Je ne parlerai que des relations entre hommes dominants et femmes soumises. Les relations entre une domina et son soumis sont encore différentes. Ce n’est pas le propos ici.
Monnayer la confiance, tarifer l’abandon
“Soumise professionnelle”, une variante du plus vieux métier du monde ? Je veux bien, mais cette “spécialisation” me met particulièrement mal à l’aise. Certes, il s’agit bien d’accepter, contre rémunération, d’effectuer des prestations de soumission envers un autre individu. Quelles sont ces prestations ? Selon l’article, des fessées, des coups de cannes, des orgasmes forcés (lire ces deux termes accolés me laisse perplexe) ainsi que toutes sortes d’humiliations mises en scène.
Dans une “vraie” relation, j’entends par là, une relation non tarifée, se soumettre à son partenaire, signifie accepter que, l’espace d’un instant, il prenne les rennes. Durant ce laps de temps, la “soumise” place assez de confiance en son “maître” pour le laisser faire ce qu’il veut d’elle. Cela requiert une capacité d’abandon et de lâcher prise qui n’est envisageable que si le maître et la soumise se connaissent et savent “jusqu’où ils peuvent aller trop loin.”
Dans le cadre d’une relation tarifée avec une soumise, l’abandon s’obtient contre de l’argent, de même que l’orgasme dans le cadre d’une relation avec une prostituée “classique”. Cet abandon n’est pas réel. Il est pourtant indispensable pour qu’une “vraie” relation de soumission fonctionne. On me dira que c’est le jeu dans une relations tarifée. Mais les coups reçus et les humiliations subies sont bien réels. Oui, la soumise a un « safe word » grâce auquel elle peut tout arrêter. J’ai peine à croire que ce soit aussi simple.
Je ne prétends pas qu’une prostituée “classique” ne prend jamais de plaisir avec ses clients. Mais il peut arriver qu’elle simule. Pendant le temps durant lequel elle simule, libre à elle de “déconnecter”, de penser à autre chose. Une soumise professionnelle peut-elle en faire autant ?
Des coups et des humiliations consenties contre de l’argent
Les prestations de la soumise, même si elles incluent du sexe, sont sensiblement différentes de celles proposées par une prostituée “classique”. Les jeux BDSM se nourrissent de violences verbales et physiques ainsi que d’humiliation.
Je comprends qu’on puisse aimer ça dans le cadre d’une “vraie” relation, mais de là à monnayer ce type de service ? On me dira que c’est la même chose dans une pour une prostituée classique. J’en conviens (difficilement) même si pour moi, cela revient à accepter des coups et des humiliations contre de l’argent…
L’implication émotionnelle, qui existe évidemment dans un rapport tarifé classique est selon moi encore plus grande dans un rapport de soumission contre de l’argent. La question que je me pose est : jusqu’où est-on prêt à aller pour de l’argent ? La réponse est sans doute propre à chacun.
Une dérive dangereuse
“Ca varie entre 400 à 800 euros de l’heure. Ça dépend vraiment de ce que la session comporte.” Vraiment ? En ces temps de conjoncture économique difficile, n’est-il pas un peu irresponsable d’afficher de tels chiffres ?
L’argent, l’indépendance et le fait qu’elles aiment ce qu’elles font, sont les raisons le plus souvent évoquées par les prostituées, quand on leur demande pourquoi elles ont choisi ce métier.
Je ne critique absolument pas ce choix, qui ne me semble pas moins respectable qu’un autre.
Pourtant, la dernière question de l’article : Quels conseils donneriez vous à une fille qui veut devenir soumise professionnelle ?” me parait extrêmement dangereuse. Certes, la jeune femme interrogée met en garde : “Ne faites surtout pas ce boulot si vous n’appréciez pas réellement être soumise”. Mais cet avertissement me semble bien faible. Je trouve qu’elle minimise les séquelles physiques mais surtout psychologiques que peuvent laisser de telles pratiques (des coups et des humiliations volontairement subis) dans un cadre aussi peu sécurisé que celui-là.
Il y aura toujours de la demande pour ce genre de service. Mais cet article et ses photos sexy, contribuent à renforcer un sentiment de toute puissance et d’impunité (puisque le rapport est consensuel) d’hommes simplement violents ou avides de pouvoir qui utilisent l’appellation aujourd’hui chic de BDSM pour masquer des tendances nettement plus glauques.
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Je vais mettre de côté l aspect purement bdsm et aussi plus psychologique du sujet . Important il est vrai dans ce genre d’histoire mais la je vais attaquer par la face pragmatisme . Deux questions me viennent à l’esprit . Qui sont ces fameuses prostituées, dans le sens quel est leur parcourt ?
Et jusqu’ ou sommes nous prêt à aller pour de l’argent ?
Vu les tarifs , on ne peu pas , me semble t’il mettre de côté ces questions .
Mettre de côté l’aspect psychologique et l’aspect BDSM, c’est oublier la soumise et ne parler que de la professionnelle. Ce n’est qu’une partie du propos.
Le parcours de ces femmes n’est pas unique, il est différent pour chacune. L’argent est une motivation forte, mais peut être pas la seule. Il faudrait le leur demander.
Je n’ai pas lu l’article de base qui vous a interpellé maintenant je suis désolé de ne pas être surpris par cette pratique. Depuis hélas fort longtemps (mais vraiment longtemps) la femme est monnayé, acheté, vendu, de manière plus ou moins affiché la pratique reste toujours en fond sonore.
Sur ce qui est de la relation de soumission, vous employez un terme que je trouve essentiel “VRAI” après la portée de ce terme (comme beaucoup d’autre) reste sujette à une définition individuelle. Mais pour mémoire la plus grande partie des relations zumaines sont sous tendues par un rapport d’offre et de demande – combien de femme reste marié avec un pov gars trop enfant pour seulement avoir l’idée de faire la vaisselle ou de l’embrasser tendrement, combien d’homme reste en couple avec une pov fille trop sujette à la morale pour oser lui dire j’ai envie / j’ai pas envie…par exemple. La raison … souvent la peur viscérale d’être seul.
Pour ce qui est des demandes exotique et tarifés, ma femme étant camgirl j’en entends des vertes et surtout des pas mures, les vrais Maitres (il faut un minimum de cervo) ne courent pas les rues par exemple, la plus part du temps les mètres veulent surtout un puching ball.
Après à ta question “jusqu’où est-on prêt à aller pour de l’argent ?” …
au ben très loin j’en ai peur par exemple bosser 8h par jour + 2h bon poids de transport pour 7.5€ net / heure dans une usine d’embouteillage de flacon ou comme femme/homme de ménage, ou serveur(se), ou comme ouvrier(e) ou comme … avec toute sorte d’humiliation tout aussi douloureuse que celle d’une femme / homme (il doit y en avoir mais on en parle moins) qui moyennant un forfait va vivre une pseudo domination et un vrai match de boxe parfois.
Mais hélas, mille x hélas, combien de femme (et d’homme) au foyer vive ça tout les jours contre … l’assurance que leur bourreau rentrera le soir ?
Je voudrais juste préciser que je suis d’accord avec vous sur la folie de cette mode BDSM, de la marchandisation de la vie (humaine et autres) mais aussi dire que c’est déjà là devant chez nous, juste c’est un peu plus discret voilà tout (comme quoi la quantité de lubrifiant à son importance)
And for last je me suis “un peu” intéressé à la prostitution, au rapport dominant dominé et en arrive souvent à la conclusion de “qui tient l’autre en laisse ?” autrement dit “qui promène la laisse ? le chien ou le maitre ?”
En tout cas merci pour cet article qui permet un espace d’échange sur ce sujet
(et PS je ne trouve pas la Anastasia de 50 nuances si douce que ça – et on a trouvé le film très … pfffffff)
Voilà des bisous et merci encore pour tout ce que vous êtes 🙂
Renaud
Ton article est passionnant et la réalité qu’il pointe me fait frémir
Pour ma part, il m’a tellement interpellé que j’ai décidé d’y répondre. Je suis contente de voir que tant de lecteurs se sentent concernés.
C’est dommage que tu ne mettes pas le lien de l’article dont tu parles, à moins que ce soit un choix. Pour l’avoir lu, j’avoue que je me suis retrouvée perplexe également face à ma tablette. En effet, toutes les personnes que j’ai pu interroger pratiquant le bdsm m’ont affirmé la même chose : le vrai don de soi n’est possible qu’avec un amour frôlant la vénération. Et les dominants ont pour but de révéler la soumise, de la libérer de ses inhibitions, parce qu’ils l’aiment, tout simplement. C’est une relation qui peut sembler étrange vue de l’extérieur, mais qui va au-delà d’un simple jeu de rôle. Et la plupart des gens qui pratiquent semblent être plus équilibrés dans tous les domaines de leur vie, que ce soit le côté relationnel ou professionnel.
Mais là, un homme qui monnaie le corps d’une femme pour quelques heures, sans engagement affectif, d’autant plus quand des sévices sont inclus dans le “forfait de base”, acquière tous les droits sur elle. Bref, il paie pour la tabasser. Et franchement, cela fait froid dans le dos. Je ne juge pas ce genre de rapport, quand on tombe sur des gens respectueux. Mais, encore plus que dans un rapport tarifé classique, je craindrais les dérapages…
L’article est en lien dans mon article. Il te suffit de passer ta souris sur la phrase où je parle de l’article. Ce bout de phrase là, c’est un lien : Par contre, quand j’ai lu dans cet article qu’on trouve à présent des « soumises professionnelles »
Faut que je fasse en sorte de rendre mes liens plus visibles.
Ah… J’avoue que ça m’effraie, aussi. Je savais que ça existait, déjà. J’avais vu un reportage il y a des années et des années où il était question, à un moment donné, d’une soumise professionnelle, et ça m’avait posé le même problème. S’il y a quelqu’un à côté pour gérer la scène, à la rigueur, et pouvoir intervenir si nécessaire, je trouverais ça plus rassurant, mais il est évident que ce n’est pas le cas…