Aurore Baie, auteure
Mon matou préféré me réclamait une interview pour commencer l’été. Le voici sous le charme de la talentueuse plume d’Aurore.
Chaki: Coucou Aurore ! Comme tu le sais, avec les amies auteures de la Miss, j’ai ma question rituelle (surtout quand elles sont auteures et jolies…) : je peux monter sur tes genoux ?
Aurore : Vas y, fais comme chez toi. Mais juste parce que tes pattes sont plus poilues que les miennes. Je suis en train de boucler ma valise, je n’ai pas eu le temps de me pencher sur l’épilation estivale.
Chaki: ? Poilu, moi ? Heu… Bref. Tu es un peu ma “lanceuse d’alerte” sur Facebook : j’ai beaucoup ri et réfléchi aussi en lisant tes interrogations existentielles de bon matin, par exemple : “n’est-ce pas réducteur de penser que le désir d’un homme s’arrête à une poignée de poils ou à un maquillage fatigué en fin de journée ?” Grâce à toi, je sais à présent que : “si ton portable est trop petit pour que tu voies bien la double péné, tu peux demander à Pornhub de tout te décrire… ” Tu les trouves comment, tes sujets ?
Aurore : J’ai des alertes infos sur les moteurs de recherches, je fouine beaucoup, je suis de nature curieuse… Facebook est également une mine inépuisable d’inspiration, entre les copains qui partagent sur leurs murs personnels ou les personnages « publics » qui relaient leurs blogs (Gentle, Lelo, Mangerbaiser, pour citer les premiers qui me viennent à l’esprit). Quand j’ai ouvert mon compte, à la base, c’était pour alimenter mes nouvelles à l’aide de témoignages : je me souviens avoir demandé quelle était la différence, en termes de sensations, entre la fessée, la badine et le martinet, par exemple. Et j’ai adoré échanger avec des vraies personnalités, bien dans leur peau et leur sexualité. Depuis, j’ai l’impression de tenir un bar où chacun vient faire sa petite pause dans la journée et dépose son avis sur la question du jour.
Chaki: Qu’est ce qui te motive, te passionne, te fais te lever, même les lendemains de cuites ?
Aurore : Pour me lever le matin malgré la gueule de bois, j’ai bien envie de te répondre : les enfants. Ces horribles bestioles ne savent pas ce que c’est d’avoir un marteau-piqueur dans la tête. Je prendrai ma revanche quand ils auront 20 piges et auront passé la nuit en boîte. J’ai une bonne mémoire.
Chaki : Niarf, niarf, niarf…
Aurore : Pour le reste, eh bien… Je crois que ce qui me passionne, c’est le genre humain. Capable du meilleur comme du pire. Par amour, foi, loyauté, l’Homme déplace des montagnes. Je trouve cela passionnant. J’aime discuter avec des gens qui n’ont pas la même vision de la vie que moi, ça ouvre l’esprit. Facebook est une vraie cour de récré, pour moi. Soyons honnêtes : nous avons tendance à traîner avec des gens qui nous ressemblent, qui ont les mêmes idées politiques, les mêmes hobbies, le même âge, la même catégorie socio-culturelle… J’ai toujours trouvé ce clivage désolant. Sur le réseau social, j’ai pu m’entourer de personnalités différentes. J’adore voir que plus en plus de femmes viennent participer aux débats et de moins en moins de gros lourds venus pour choper. Mes ami-e-s auteurs et autrices, mais également tous les artistes dans mes contacts, me permettent également de faire évoluer mon écriture et ma réflexion autour de la création.
Chaki : J’ai dévoré ton blog : Histoires de deux dos. Comment en es tu venue à écrire de l’érotisme ? (Plutôt que du polar ou du récit de vie?)
Aurore : J’ai toujours été passionnée par la sexualité, le désir. J’en parle librement, même de manière clinique. Je n’ai jamais compris qu’on puisse faire des mystères autour. J’ai une cousine, enceinte à seize ans parce que ses parents très religieux ne souhaitaient pas parler de « ça ». Et, bien sûr, l’avortement n’était pas envisageable, surtout que la famille s’en est rendue compte à six mois de grossesse. Ce manque de communication est aberrant, il flingue des existences. La sexualité doit permettre de s’exprimer. D’exprimer la personne que nous sommes, les émotions qui nous animent. De se sentir bien dans notre corps, de l’habiter réellement. Peu importe ce qui motive la pulsion sexuelle : quelque chose essaie de sortir. Garder à l’intérieur, c’est risquer de se laisser ronger.
Je me souviens vaguement de ma première nouvelle. Nous étions trois copines à s’être lancées le défi de rédiger un texte court un peu coquinou, du haut de nos 16 ans. Quand nous avons fait tourner les copies, elles ont reconnu que j’étais plus à l’aise dans l’exercice qu’elles ! J’aime écrire. J’en ai fait mon métier, je suis journaliste. J’ai eu plusieurs relations épistolaires, j’ai noirci des pages à l’encre de mes sentiments à l’époque de mon premier amour, je profitais des séparations estivales pour pondre des pavés à mes amies qu’elles lisaient sur la plage… Je n’ai pas la prétention de croire que mes textes valent grand-chose, mais j’ai besoin de les faire sortir, sinon, ils tourbillonnent dans ma tête jusqu’à l’obsession.
Chaki: Je sais que la Miss préfère faire jouir ses personnages plutôt que les tuer. Mais ça peut évoluer…
Aurore : Merde, les premières pages de mon roman ont fuité ? Ça commence effectivement avec un passage à tabac dont le héros ne ressort pas vivant… On entend même les os craquer, la cervelle se répand partout et… c’est moi ou tu pâlis ? Tu veux qu’on change de sujet, qu’on passe à la question suivante ?
Chaki: J’ai (re)découvert ta plume légère et pétillante, car tu fais partie des blogs que je lis régulièrement.
Aurore : Oh… Merci ! Je peux te gratouiller entre les deux oreilles, pour montrer ma reconnaissance ?
Chaki: Vas-y. Oui, ici, derrière l’oreille. Ron-ron.
Aurore : Je suis toujours étonnée quand un lecteur ou une lectrice m’avoue avoir pris de son temps pour découvrir mes mots. À la base, le blog, c’était une petite bulle, un endroit où je pouvais mettre mes textes au lieu de les écraser une fois rédigés. Ça me changeait de mes papiers si sérieux, pondus pour le boulot. Et je te confie un truc, sous le sceau du secret, hein, en off, mon cher confrère : tout ça, c’est la faute des Nuances.
Chaki: C’est pas vrai ?
Aurore: Pas besoin de me lancer ce regard, je m’explique. Le phénomène avait enflé, j’étais curieuse. Perso, j’ai lu le Lien de Duriès à 19 ans. Aucune appréhension d’être choquée. Pourtant, je l’ai été. Par le puritanisme, le jugement porté sur les pratiques décrites. J’ai fermé le bouquin et je me suis dit : « ce genre de pamphlet pour le missionnaire réalisé dans les sacro-saints liens du mariage fonctionne, malgré son champ lexical et sa construction narrative pauvres à pleurer, et je devrais avoir honte de ma plume ? Enlève-toi le clavier du fondement, ma fille, et assume tes textes. » Au début, j’ai filé l’adresse à mes meilleures copines, qui l’ont faite tourner. Je me souviens comme j’étais excitée de voir les 100 pages vues atteintes ! C’était il y a deux ans et je ne regrette qu’une chose : ne pas avoir pris confiance en moi avant. C’est libérateur.
Chaki: C’est vrai, c’est libérateur. Surtout quand tu changes le clavier de place.
Tout cela me donne très envie de te demander : quand est-ce qu’on lit ton roman ?
Aurore : Un ami qui connaît très bien ma plume m’a dit un jour : « tu es une sprinteuse, toi, pas une marathonienne. » Je pense qu’il a raison. Cela m’excite intellectuellement d’arriver, en quelques mots, à planter une intrigue, à donner corps à des personnages. Maintenant, j’aimerais tenter d’écrire plus long. J’ai un roman qui avance doucement, mais je crois, qu’à terme, il s’agira d’une maxi-nouvelle d’une centaine de pages, complétées par d’autres. Avec un thème un peu fantastique pour chacune d’entre elles. Je lis pas mal de fantastique, je me demande si je suis capable d’en écrire. Mais, je suis parasitée par mes nouvelles pour Histoire de deux dos et par mes discussions sur Facebook… C’est chronophage, ces bêtises…
Chaki: Je sais. La Miss y passe trop de temps si tu veux mon avis de chat. Tu pourrais essayer l’érotique fantastique, non ?
Au fait, quels sont tes projets pour la rentrée ?
Aurore : Nan, mais t’es sérieux, là ? Tu me parles de la rentrée alors que je ne suis en vacances que dans sept heures ? Pour l’instant, je ne pense qu’à ça : lectures au bord de la piscine, tomates-mozza et siestes, crapuleuses ou non.
Chaki: Chouettes projets !
Aurore : Après, en septembre, je me laisserai à nouveau emporter par le tourbillon. Peut-être que si les éditions Textes Gais relancent un appel à textes pour une bonne cause, je participerai. J’ai loupé le dernier, blindée de travail, mais j’ai été publiée les deux fois précédentes. Les droits d’auteurs sont reversés à des associations contre SOS Homophobie ou le Refuge et j’adore participer à cette aventure.
Chaki : Je pense que la Miss aussi. Tu la tiendras au courant ?
Aurore : Et puis, il faut que je change le design du blog. J’avais pris le plus simple, parce que je ne publie que des textes, mais ce n’est pas forcément le plus ergonomique. Après, j’avoue ne pas être très à l’aise avec la technologie moderne, c’est la raison pour laquelle j’ai repoussé ce chantier pendant longtemps. Tu crois qu’un-e petit-e jeune pourrait s’y coller pour moi, sur le design du blog, en échange d’un brownie maison ? Au fait, Chaki, ne dis pas à tes lecteurs qu’en vrai, je suis nonagénaire. Ça casserait le mythe de l’autrice d’histoires qu’on lit à une main en laissant l’imagination galoper.
Chaki : Bien sûr, ça reste entre nous.
Aurore : Et sois mignon, viens m’aider à choisir dans ma pile à lire ce que j’amène en vacances.
Chaki : Si je ne devais en emporter qu’un ce serait A Cœur pervers d’Octavie Delvaux. D’ailleurs, j’en parlerai très bientôt.
Aurore : C’est pas tout ça, mais la valise, elle va pas se faire toute seule. Si t’es gentil, je suis même prête à laisser un ou deux maillots de bain à Paris pour te faire de la place dedans. Alors, tu te laisses embarquer dans mon monde ?
Chaki: Non désolé. Mon cœur n’appartient qu’aux genoux de ma maîtresse (mais j’aime les Brownies) Tu comprends, je viendrais bien avec toi, mais la Miss se mettrait à bouder et je n’aime pas ça. En plus, j’ai des copines qui m’attendent, tu comprends… Mais tu me racontes en rentrant, promis ?
Pour suivre l’actualité d’Aurore :
Blog : www.histoiresdedeuxdos.wordpress.com
Facebook : www.facebook.com/AuroreBaie
Twitter : nan, lâche l’affaire, je ne tiens pas mon compte à jour, c’est impossible pour moi de m’exprimer en 140 caractères seulement. (N’importe quoi, t’as même pas essayé. La Miss elle disait la même chose. Maintenant, y plus moyen de la décoller. On se retrouve là-bas !)
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